5 axes de travail de la Biennale

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Les 5 axes suivants constituent les 5 enjeux prioritaires sur lesquels il est proposé que la Biennale puisse échanger mais aussi produire un positionnement. 

  1.  Éducation Nouvelle et échec scolaire socialement marqué
  2.  Éducation globale, Éducation Populaire, Éducation Nouvelle
  3.  L’Éducation Nouvelle face aux totalitarismes et populismes
  4.  L'Éducation nouvelle face au défi écologique
  5. Privatisation, marchandisation, coopération, internationalisme

I. Éducation Nouvelle et échec scolaire socialement marqué

Au regard des évaluations nationales et internationales et des travaux de recherche disponibles sur l’école, deux remarques s’imposent : il existe un échec scolaire important et cet échec est plus marqué dans certains pays que dans d’autres par les origines sociales des élèves. Dès lors, quelques questions se posent. Comment comprendre et expliquer ces phénomènes ? Cette question pourra être abordée sous l’angle historique (des continuités et des changements) et sous l’angle des comparaisons entre pays afin d’appréhender comment l’échec scolaire se construit de manière identique ou différente et quelles sont les différentes solutions mises en œuvre pour y remédier ainsi que leurs effets.

Il sera aussi intéressant de voir comment les acteurs et les mouvements issus de l’Éducation Nouvelle expliquent ces phénomènes et s’ils partagent les mêmes analyses de leurs causes.

Une autre question porte sur certaines mises en cause des pédagogies issues de l’Éducation Nouvelle. En effet, un certain nombre de sociologues et de médias, avancent que ces pédagogies profiteraient plus aux élèves issus de milieux favorisés et contribueraient à l’échec des élèves issus de milieux défavorisés. Quels sont les fondements des arguments avancés, par exemple en ce qui concerne les implicites ou la proximité des valeurs ? Sur quelles données se basent ces discours ? Quelles sont les méthodes utilisées pour fonder ces discours critiques ? Quelles solutions sont alors proposées par ceux qui mettent en cause les pédagogies issues de l’Éducation Nouvelle ? Quelles réactions et analyses ont les mouvements de l’Education Nouvelle face à ces mises en cause ?

Une autre question fondamentale concerne les réponses que l’Éducation Nouvelle est susceptible d’apporter à cet échec. Ici encore, les acteurs et les mouvements de l’Éducation Nouvelle sont-ils d’accord sur les solutions possibles ? Quels sont les points de convergence et les points de divergence ?

Comment tenter de résoudre les tensions entre les principes et les pratiques se réclamant de l’Éducation Nouvelle et les contraintes des systèmes scolaires « classiques » (emploi du temps, modes d’évaluation, pression pour la sélection...). En effet, pour certains sociologues, l'Ecole a besoin de l'échec pour fonctionner. Comment les mouvements pédagogiques réagissent-ils face à ce constat ?

Que proposent les mouvements de l’Éducation Nouvelle face à la double mission que nombre de gouvernants imposent à l’école : « Instruire-éduquer et sélectionner » ? Rompre avec l’obligation de sélectionner, s’y résoudre ou ruser avec ? Proposer des écoles différentes, alternatives, expérimentales, à l’intérieur du système public ? Créer des écoles privées ? Se battre sur le terrain politique pour construire un nouveau contrat scolaire ?

Il serait aussi intéressant d’avancer sur la question de l’articulation entre un échec scolaire, socialement marqué et les discriminations liées à des facteurs tels que : la pauvreté, la couleur de peau, le sexe, l’ethnie, l’orientation sexuelle, la religion.

 

II. Éducation globale, Éducation Populaire, Éducation Nouvelle

Éducation globale
L'éducation est toujours « une » : un enfant, un adolescent, un adulte reçoivent tout au long de leur vie diverses influences éducatives, plus ou moins convergentes mais, au total, c'est bien d'une éducation qu'il s'agit, puisque c'est une personne qui poursuit un processus éducatif et qui, progressivement, se constitue dans son unité, transformant précisément l'ensemble de ce qu'elle reçoit et co-construit en un projet qui devient le sien. Parler d'éducation globale c'est donc penser la « complémentarité éducative ». Elle n'est pas, ne peut pas être, une sorte d'« effet de tenaille » mais doit, en revanche, s'assumer comme « ouverture d'un espace ». En d'autres termes, il ne s'agit pas de faire "alliance éducative" pour s'entendre afin de façonner ensemble un individu qui, ainsi, ne pourrait plus nous échapper. Il s'agit de travailler en commun afin de permettre à cet individu de se construire lui-même. C'est pourquoi complémentarité ne signifie nullement confusion ni même complicité. Complémentarité signifie, d'abord, repérage des fonctions spécifiques de chaque éducateur et de la manière dont elles s'agencent pour ouvrir un espace à l'expression d'un sujet.

Éducation Populaire
L'apport essentiel de l'Éducation populaire, c'est l'affirmation que le « faire ensemble » fonde le « vivre ensemble ». C'est l'affirmation de la créativité individuelle et collective dont chaque citoyen peut faire montre et de la nécessaire concrétisation des propositions exprimées dans quelque domaine que ce soit : imaginaire, social, politique, économique, etc. Aujourd'hui, nous sommes submergés par deux types de discours qui, quoiqu'apparemment contradictoires, se renforcent réciproquement : les discours qui prétendent fonder le « vivre ensemble » sur le communautarisme et ceux qui veulent le fonder sur l'autoritarisme. La tradition de l'Éducation populaire récuse ces deux visions. Plus globalement, les mouvements d'Éducation populaire ont deux missions au regard de la complémentarité éducative évoquée plus haut : une mission spécifique sur les « tiers-lieux » et une mission plus générale de réflexion et d'animation sur la complémentarité éducative elle-même.

Éducation Nouvelle
Les fondements de l’Éducation Nouvelle, avec ses valeurs d'émancipation, de coopération, d'expression et de construction des apprentissages témoignent d'une convergence d'idéaux avec l'éducation populaire et globale. Pour autant, son ancrage pédagogique et scolaire a suscité, dans certains pays, une construction privilégiée dans l'univers de l'école, avec, pour et par les enseignants au sein de nos mouvements, et des actions souvent centrées sur l'espace et le temps de l'école. Quand, où et comment ces actions s'articulent- elles avec celles des professionnels de l'éducation populaire ? Comment se joue la connaissance, la reconnaissance réciproque pour ce "travail en commun" évoqué plus haut ? Y a-t-il un enjeu aujourd'hui (et si oui lequel) à revendiquer l'appartenance des mouvements d’Éducation Nouvelle au champ de l’Éducation populaire, de l'éducation permanente ? Y a -t-il un enjeu (et si oui lequel) à militer pour une reconnaissance du champ et des acteurs de l’Éducation populaire, de l'éducation permanente ? Comment les apports et les apprentissages effectués en dehors de l'école sont-ils pris en compte dans le parcours de l'enfant-élève, notamment dans la définition de "réussite" et "d'échec" ? Comment l'éducation populaire peut-elle permettre aux citoyens d'acquérir des capacités à comprendre le monde et y agir quand bien même le système social, dont les systèmes d'enseignement, l'ont convaincu de "ses" incapacités ? Quelles sont les variations de ces enjeux selon les contextes historiques différents et les réalités actuelles au plan international ?

Le projet de l’éducation populaire, comme celui de l’Éducation Nouvelle, est de s’attaquer aux rapports de domination et non de donner la possibilité à quelques dominés de devenir des dominants. Elle ne peut donc être que « globale » car elle se veut porteuse d’un projet émancipateur sur les plans éducatif, culturel, social, économique et politique…

 

III. L’Éducation Nouvelle face aux totalitarismes et populismes

 

L’éducation à la curiosité, l’esprit critique et la liberté représentent des valeurs fondamentales de l’Éducation Nouvelle. Cependant dans de nombreux pays des mouvements autoritaires sont au pouvoir ou menacent de s'en emparer. Ils semblent révéler des tendances sociétales et politiques puissantes qui mettent en péril toute tentative d’accroître les espaces éducatifs favorables à l’émergence d’individus ouverts au monde dans toutes ses complexités. Face aux crises multiples et profondes de notre monde, dont les raccourcis et les solutions soi-disant simples aggravent les dynamiques, il paraît urgent de réfléchir ensemble aux réponses à construire face à ces tendances mettant à mal les idéaux de l’Éducation Nouvelle.

Comment peut-on définir les termes de totalitarisme et de populisme ? Peut-on mettre sur le même plan le
terme « Extrémisme » sachant que certains militants de mouvements d’éducation nouvelle s’en réclament ?

  • Comment comprendre l’émergence ou le maintien de ces tendances autoritaires ?
  • Comment l’éducation peut-elle peser pour enrayer ces phénomènes
  • Quelle est la situation de l’éducation nouvelle face à cette réalité qui est une véritable menace ?
  • Comment cela se présente dans différents pays, voire dans différentes régions d’un même pays
  • Quels sont les points communs et les différences dans les pays concernés ?
  • Par rapports aux menaces autoritaires, comment penser l’internationalisme de nos mouvements ?
  • Quelles alliances politiques peuvent éventuellement permettre de proposer des alternatives ?
  • Face aux populismes et totalitarismes, comment assumer et dépasser la posture d'opposition ?
  • Quels peuvent être les champs d’actions de l’Éducation Nouvelle ? Quelles vont être les stratégies en
    fonction des différents mouvements et acteurs de l’Éducation Nouvelle ?
  • Est-ce qu’on se limite aux champs d’action propres à nos mouvements ou est-ce qu’on s’allie à d’autres mouvements, (anti-raciste, anti-domination), voire à des mouvements ou partis politiques ?
  • Est-ce que nos mouvements sont des « éveilleurs de conscience », quelle position peut-on avoir ?
  • Quelles positions par rapport aux médias dominants et de quelle manière intervenir ?
  • Quelles postures professionnelles face à des extrémismes ?
  • Jusqu’où les recherches peuvent-elles nous aider à comprendre ces questions ?

 

IV. L'Éducation nouvelle face au défi écologique

 

Face au changement climatique, à la pollution air-eau-terre, la finitude des ressources énergétiques et minières, à l'effondrement de la biodiversité quelles réponses peut proposer l'éducation nouvelle ? Elle doit être porteuse d’espoir et d’«utopie réaliste». Certes, il faut écouter l’éco-anxiété, les angoisses des jeunes, leurs colères ou leurs révoltes, mais aider à transformer celles-ci en force de mobilisation et d'action conjuguant le court terme et le long terme.

Nous devons donc tout faire pour que :

  • Les programmes scolaires s’emparent davantage de ces questions : l'acquisition de véritables savoirs scientifiques étant déterminante pour comprendre réellement les situations dans leur complexité.
  • Des projets émergent et soient soutenus dans les structures scolaires ou dans un cadre plus informel.
  • Des débats aient lieu dès le plus jeune âge.
  • Des partenariats entre acteurs de la transition écologique se multiplient.

Lors de la Biennale, les débats pourront porter sur les questionnements suivants (liste non exhaustive):

  • Comment faire de l’éducation aux « gestes écologiques » non pas un alibi qui détourne de questions systémiques et complexes, mais un levier de prise de conscience pour conjuguer local et global ?
  • Dans le cadre institutionnel, jusqu’où être un « militant » de la cause écologique, avec le risque de verticalité et d’imposition magistrale, fût-ce donc pour « la bonne cause » ?
  • Comment ne pas en rester à une « écoute » des jeunes, comment ne pas en rester à une opposition stérile de générations ?
  • Comment questionner nos modes de consommation, sans mettre un signe égal entre comportements individuels et responsabilité écrasante d'un système économique basé sur les seuls profits ?
  • Comment intégrer le rôle de la philosophie de l’écologie qui est de questionner l'impact des activités humaines sur la nature, la valeur de la biodiversité, de la durabilité et de la justice environnementale ?
  • Comment développer des formes pédagogiques basées sur la coopération, suscitant le questionnement et l'entrée dans une pensée complexe ?
  • Comment relier les Arts et la Culture aux questions environnementales, développer une sensibilité à la « beauté de la nature » ? Comment impliquer toutes les disciplines scolaires pour y contribuer ?
  • Comment aborder le concept de justice environnementale qui garantit que tout humain qu'il ait accès un accès équitable aux ressources naturelles, que les coûts et les avantages de l'exploitation de ces ressources soient partagés équitablement ?

 

V. Privatisation, marchandisation, coopération, internationalisme

 

Plutôt que d’examiner surtout les antagonismes entre le public et le privé en éducation, il serait intéressant de nous entendre sur des objectifs et des règles de fonctionnement des organisations privées à vocation éducative et des objectifs et des règles de fonctionnement des organismes publics d'éducation. Il est utile que nos revendiquions sans cesse que les états rencontrent leurs obligations dans l’organisation concrète du droit à l'éducation défini dans la Déclaration Universelle des Droits Humains.

Comment formulons-nous nos exigences vis-à-vis des états pour une organisation des systèmes éducatifs adaptés à la culture et aux aspects sociaux de leurs populations respectives, qui ne fassent pas de tri sélectif et qui ne laissent personne sur le carreau ?

Les écoles « marchandes » répondent à une logique de sélection et de promotion des "héritiers". Des parents payent leurs services assez chers et, en échange, elles forment les enfants pour intégrer le groupe des cadres dirigeants de l'économie et de la politique. Ces écoles constituent également un marqueur social important pour les familles « héritières » en compétition pour un statut social.
Il est fondamental que les gouvernements travaillent à garantir que l’éducation reste un bien commun et un droit universel, accessible à tous les élèves mais aussi à tous les citoyens en dehors du cadre scolaire,
indépendamment de leurs capacités économiques. A nous d'y veiller.

L'internationalisme est une composante importante des mouvements militants pour la paix dans lesquels l'Education Nouvelle s'est inscrite dès ses débuts.

Comment travailler, agir, chercher, penser ensemble en prenant en compte les identités particulières sans exclure celles et ceux qui ne parlent pas comme "nous", en puisant dans les ressources anthropologiques issues d'expériences et de connaissances construites dans la diversité. Quelle éducation à la paix à l'heure où de nombreux conflits sont entretenus et ne peuvent plus être contrés par les organisations internationales ? 

Utilisons la rencontre de la Biennale comme lieu de renforcement et d’organisation des programmes d'échanges culturels dans lesquels les mouvements de Convergence(s) ont une solide expérience.